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Introduction

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Le Musée d’Ipotêtu est un musée virtuel en ligne et une analogie graphique en trois dimensions du collège Pierre Emmanuel à Pau. C’est une commande publique au titre du 1% artistique. L’art évoluant avec les techniques et les technologies, il n’était pas incohérent que le commanditaire, le Conseil Départemental des Hautes-Pyrénées, souscrive à la réalisation d’une oeuvre qui se situe dans le champ du numérique. C’est surtout en réponse au caractère innovant du collège que l’œuvre a été commanditée, l’établissement ayant intégré dans ses enseignements des outils de productions et de diffusions numériques au service d’enjeux pédagogiques et créatifs. Nous étions par ailleurs invités à répondre à un cahier des charges ambitieux qui demandait de concevoir et réaliser une œuvre durant deux années avec la participation des collégiens et des enseignants.

Afin de répondre à l’ampleur et la complexité de cette commande publique, nous nous sommes organisés en équipe. Le Collectif DING, l’artiste Elsa Mazeau et le designer Sebastien Garciaz se sont associés pour répondre à l’appel d’offre. Ensemble, nous avons invité trois autres artistes à nous rejoindre : Olivier Toulemonde, Fabrice Cotinat et Yu-Ting Su ainsi que l’archéologue Laurence Cornet. Maëva Changeur et Marina Bianchi se sont succédées pour accompagner le projet dans le cadre de missions de service civique, implantées au sein du collège et dans l’atelier du Collectif Ding. Vous trouverez sur ce site internet les textes des deux théoriciens d’art, Gunther Ludwig et Lucia Sagradini qui développent des réflexions inédites sur la nature du Musée et ses oeuvres. 

Le collectif Ding et sa structure administrative l’Association Adarum, ont pris en charge la coordination du projet afin d’assurer le lien entre le commanditaire, le bénéficiaire et l’équipe artistique. Nous avions à charge la responsabilité de la bonne marche technique et financière du projet. Si l’organisation du calendrier de nos interventions au sein du collège n’a pas été sans complexités organisationnelles, onze ateliers de pratiques artistiques ont eu lieu en 2017 et 2018, dans des temporalités différentes et adaptées. Du chaudron de ces ateliers sont sortis les matériaux qui ont permis aux artistes de réaliser dans des temps de post-production, 90 œuvres et séries d’œuvres. Objets graphiques 2D et 3D, objets photographiques, vidéos et sonores, ces œuvres sont aujourd’hui présentées et activées dans l’environnement numérique et interactif du Musée en ligne. 

Le site internet réalisé par Sébastien Garciaz constitue l’écrin du Musée d’Ipotêtu ainsi que son support documentaire et l’on peut y trouver en textes et en images, les contenus de chacun des ateliers. Il est préférable d’être équipé d’un ordinateur récent et d’une bonne connexion internet pour appréhender le Musée et ses œuvres dans les meilleurs conditions de navigation. Limites structurelles du Musée en ligne dans un univers numérique instable et mutant, les technologies qui lui garantissent son existence sont aussi celles qui le rendront obsolète. L’oeuvre commanditée est dépendante d’internet et de l’évolution du code dont il est fait. Lié conventionnellement à la logique du 1% artistique, le Musée en ligne doit être assuré d’une pérennité de dix ans sur la toile et pourra s’éteindre en 2029. 

Pour s’assurer de la conservation de l’œuvre et considérant que le Musée en ligne est voué à disparaître du fait de sa future obsolescence, nous l’avons léguée au collège dans deux stations mobiles réalisées par l’artiste Christophe Clottes et équipées de PC et lunettes VR (réalité virtuelle). Si vous êtes équipés de ce matériel, vous pouvez également vivre à domicile l’expérience immersive dans le Musée via le site ipotetu.com. 

Ouvrir un désir de faire de l’art en dehors de l’injonction scolaire nous a paru à tous la première condition pour recueillir l’adhésion des élèves au projet Ipotêtu. Pour y arriver, nous avons revendiqué la singularité de l’objet d’art, l’expérience du détournement et du bricolage. La pratique participative de l’art mise au coeur du projet Ipotêtu a stimulé chez les collégiens et leurs enseignants le travail avec les artistes pour créer la collection du Musée. Etant la réplique architecturale du collège, le projet de Musée devait aussi engager les élèves à jouer avec leur environnement, mais c’est surtout la nature contextuelle des ateliers qui a permis d’appréhender le collège, ses bâtiments et sa structure, ainsi que la vie en son sein. 

Pour produire des matériaux d’œuvres numériques, les ateliers ont cheminé avec un langage formel issu des arts plastiques, performatifs, visuels et sonores. Grâce aux outils prospectifs de notre associée archéologue, le projet s’est ouvert à une analyse sociale des lieux et ses usages. 

Chacun des artistes, légataire des objets construits avec les collégiens, avait la responsabilité de finaliser une ou plusieurs œuvres afin de les inscrire dans les espaces et structures numériques du Musée. De compromis techniques en aller-retours créatifs avec le développeur, des synesthésies pertinentes entre sons et images ont pu émerger dans la trame des œuvres. Celles-ci ont été intégrées aux espaces du Musée selon des protocoles d’interactions autorisés par la plasticité du code web et des principes de navigabilité empruntés au jeu vidéo. Si la malléabilité systémique du Musée due à sa facture numérique a permis des interprétations graphiques du bâtiment d’origine, son architecture calquée sur celle du collège représente une des constantes du projet. Le Musée pourrait en conclusion se réfléchir comme une utopie post-architecturale et sa collection, comme l’empreinte en creux d’un processus artistique vivant, marqué par le passage d’une génération de collégiens. 

Maîtres de leurs représentations, les collégiens et leurs parents nous ont cordialement accordés le droit d’utiliser leurs images et leurs voix. Nous les remercions chaleureusement de leur confiance sans oublier les personnes des équipes enseignantes et éducatives et tous les membres du personnel du Collège Pierre Emmanuel, sans qui rien n’eût été possible.

Jean Paul Labro & Lyn Nékorimaté

Pour le Collectif Ding